Il existe dans Lisbonne près de 90 palais , pour la plupart postérieurs au grand séisme (1755), et dont une partie est malheureusement dans un état avancé de dégradation. La restauration de ce patrimoine historique prestigieux requiert de lourds investissements, généralement alloués lorsque les édifices peuvent retrouver une fonction (hôtel, ambassade, tourisme, etc.) Les quelques palais listés ci-dessous ont cette chance et leur splendeur passée demeure.
Ce magnifique palais baroque est considéré comme l’une des plus belles ambassades de France, et par certains comme le plus beau palais de Lisbonne intra-muros. Il vaut notamment pour ses jardins luxuriants suspendus au-dessus du Tage, ses salons originaux et sa chapelle récemment restaurée. L’édifice vit défiler de nombreuses têtes couronnées et garde en mémoire les tribulations de l’histoire portugaise.
Le nom de Santos réfère à trois martyrs chrétiens de l’époque romaine, dont on peut apercevoir les bustes en pierre sur l’un des portails de l’église de Santos attenante au palais. Un couvent fut érigé sur le site de leurs sépultures, qui deviendra résidence d’un riche armateur à l’époque où le Portugal s’aventurait vers les Indes. Bientôt, le roi Manuel en personne transformera la demeure bourgeoise en palais royal, qui accueillera la célébration de son mariage avec Isabel, fille des Rois catholiques espagnols. L’exceptionnel panorama sur le Tage depuis les jardins ombrageux du palais en faisait un lieu de récréation et une alternative au nouveau palais royal du Terreiro do Paço (actuelle Praça do Comercio). Le dernier roi de la dynastie des Avis, Sebastião, en fit sa résidence principale, et l’on se plait à imaginer dans ses jardins le jeune roi écoutant Camões lui lire ses Lusiades. On peut encore admirer la table en marbre sur laquelle il prit son dernier repas avant d’engager une croisade au Maroc, où il trouvera la mort et le Portugal la défaite et la servitude. Aux 17e et 18e siècles, le palais fut agrandi et embelli par la famille anglaise des Lancaster, avec qui la couronne portugaise était alliée depuis le 14e siècle afin de conjurer le danger castillan. Relativement épargné par le séisme, le palais fut occupé par les troupes napoléoniennes 50 ans plus tard. Au 19e siècle, il fut notamment loué à la veuve de l’empereur du Brésil (Pedro 1er, dont la statue trône au centre du Rossio) puis au ministre de France à Lisbonne. Le gouvernement français se portera acquéreur du palais un an avant la chute de la monarchie portugaise (1910) et y installera définitivement son ambassade en 1948.
Le palais est parfois visitable sur demande auprès de l’ambassade. Au pire, on peut au moins passer admirer sa devanture lors d’une escapade dans le quartier voisin de Madragoa.
En bordure du parc de Montsanto, dans le quartier de Benfica (où réside le club de football éponyme), se trouve peut-être le plus singulier des palais de la région, celui de la Frontière. Construit peu après la restauration de l’indépendance du royaume sur la Castille (1640), l’édifice magnifie l’événement au travers de somptueux panneaux de faïence exaltant l’identité et la culture portugaises. Mais c’est avant tout les jardins du palais qui retiennent l’attention, que d’aucuns n’hésitent pas à qualifier de jardins portugais les plus connus au monde. Il est vrai qu’ils inspirèrent les jardins baroques de tout le pays et fournirent le décor à de nombreux films et récits (tel que celui de l’écrivain Pascal Quignard , fasciné par l’endroit). Conçus selon des principes ésotériques, ils sont habités par toute une statuaire mythologique (divinités grecques) et fantastique (monstres), et ornés d’Azulejos monumentaux représentant un curieux bestiaire satirique (singes et chats). L’on est saisi par la qualité artistique de l'ensemble, par la composition symbolique de l’espace, par son esthétique originale et équilibrée. Originaire de tous les continents, la végétation subtropicale est exubérante, les bassins, fontaines et jets d’eau sont un ravissement, et les orangers embaument l’air d’un parfum suave. Malgré les siècles, le système de captation d’eaux souterraines fonctionne toujours, et le 12e marquis de la Frontière, propriétaire du domaine, veille à préserver le Mystère.
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Situé en plein centre historique de Lisbonne, il s’agit d’un palais méconnu et discret qu’aucune ornementation extérieure ne distingue, qui vaut pourtant pour sa richesse intérieure et le symbole historico-politique qu’il porte.
Bâti au 15e siècle, son architecture médiévale originale est encore visible à travers ses portails, ses deux cheminées imposantes qui ne sont pas sans rappeler celles du Palácio Nacional de Sintra, son patio intérieur de probable influence mauresque, et son adossement à la muraille Fernandine dans laquelle s’ouvrait une porte à quelques mètres de là (cf. Rua das Portas de Santo Antão). L’édifice actuel traduit des interventions manuélines (fenêtres) et maniéristes plus tardives.
C’est dans cette propriété de la famille Almada que le comte du même nom et ses amis patriotes, aussi appelés les 40 conjurés, organisèrent le coup d’Etat du 1er décembre 1640 (jour férié au Portugal) qui permit au royaume de recouvrer son indépendance sous la houlette des Bragances, la dernière des dynasties royales portugaises. Les castillans occupaient alors le Portugal depuis 60 ans. L’obélisque de la place voisine (Praça Restauradores) commémore le même événement. Ayant bien résisté au grand séisme de 1755, le palais accueillit provisoirement les patients du grand hôpital voisin, lui entièrement rasé. Au 19e siècle, la monarchie libérale considérera les Almada comme des rebelles absolutistes et réquisitionnera leur résidence par la force. Dès lors, elle est occupée par un illustre personnage, le grand écrivain romantique Almeida Garrett, dont l’une des rues principales du Chiado a retenu le nom. Début 20e siècle, le Lycée Français de Lisbonne s’installa brièvement dans le palais. Il fut finalement cédé à l’Etat en 1940, qui y installa des associations de l’Estado Novo. Depuis 1983, il est le siège de diverses institutions historiques.
Sur réservation, la plupart des salles sont visitables, depuis le salon noble à la bibliothèque de la Sociedade Historica. De jolis panneaux de faïence baroques du 18e siècle rappellent la restauration de l’indépendance du pays. L’accès aux jardins permet de gravir les marches de la vieille muraille Fernandine (construite au 14e siècle), offrant une vue imprenable et inhabituelle sur la Baixa.
Aujourd’hui situé en plein cœur de la banlieue de Lisbonne et bordé par une autoroute, l’édifice primitif était au 16e siècle un petit pavillon de chasse isolé de la capitale. Une fois acquis par la couronne portugaise, celle-ci en fit son lieu de villégiature estival favori durant la seconde moitié du 18e siècle, avant qu’il ne devienne sa résidence permanente suite à l’incendie du palais royal d’Ajuda en 1794. Il ne le restera que peu de temps car dès 1807, la famille royale devait fuir au Brésil devant l’arrivée imminente des troupes napoléoniennes à Lisbonne. Malgré le retour des souverains portugais, le palais tomba en disgrâce et son état se dégrada peu à peu. L’Etat portugais en devint propriétaire au début 20e siècle et l’ouvrit au public dès 1940 en tant que musée et monument touristique, ce qui aida à sa restauration. On peut y admirer diverses collections royales, comprenant meubles, tapisseries, peintures, céramiques, sculptures et porcelaines.
Ayant été construit au long de deux siècles par des architectes divers, l’ensemble n’est pas des plus harmonieux. Dans sa conception initiale, le palais traduit les derniers balbutiements du rococo portugais permis par l’exploitation des mines d’or du Brésil. Mais le grand tremblement de terre de 1755 donnera une nouvelle tournure à sa réalisation : afin de résister à un éventuel nouveau séisme, les agrandissements suivants prendront la forme de bâtiments bas et étendus, donc plus stables. Le domaine vaut avant tout pour ses jardins à la française où s’épanouissent les magnolias et les mûriers, traversés de canaux et de haies d’ifs et de cyprès, ponctués d’exquises statues et fontaines d’où s’épanche le murmure des jets d’eau. On y trouve la première cascade artificielle de la région, qui deviendra bientôt l’une des singularités du jardin à la portugaise. D’exotiques panneaux de faïence tapissent les murets bordant les allées où le roi José 1er se plaisait à divaguer, insouciant des affaires de l’Etat qu’il avait déléguées à son puissant ministre, le marquis de Pombal.