Campé le long d’une jolie baie incurvée dominée par un cap rocheux, Cascais ne fut longtemps qu’un petit village de pêcheurs. Les maisonnettes de sardiniers s’ouvraient au ras de l’eau et les gens de Cascais vivaient dans leurs maisons basses, en enfilade au long des rues raboteuses qui vont vers la mer. Chaque jour, les barques sortaient, ramenaient au soir tombant de pleins filets de soles, de daurades, de calamars qu’on vendait à la nuitée sur de grands étals en plein vent, sous la lumière crue des lampes électriques. Puis les estivants, les peintres, l’ont découverte, et les villas ont foisonné, un peu au hasard.
Le village est devenu ville et compte désormais 35.000 habitants, faisant corps avec le Grand Lisbonne. Son port de pêche n’est plus que folklore touristique et la localité s’est muée en station balnéaire, favorisée par un climat amène toute l’année. Les hivers y sont extraordinairement doux, plus tièdes que ceux de la riviera italienne ou française. Il arrive souvent qu’il pleuve ou bruine à Lisbonne et que le ciel de Cascais soit radieux, nuage et brouillard se déchirant comme un manteau gris pour que le soleil baigne à nouveau sa terre d’élection.
Afin d’optimiser son temps, il est idéal de rejoindre Cascais après une virée à Sintra, d’autant que son centre historique plutôt banal et touristique ne mérite pas selon nous une venue spécifique depuis Lisbonne : compter une heure de trajet via le bus 403 (départ de la gare de Sintra), qui traverse la Serra suivant une route agréable. Un arrêt au Cabo da Roca [cap du roc], « l’endroit où la terre s'arrête et où la mer commence » selon le grand poète Camões, est envisageable en chemin.
Sans grandes attentes, il est sympathique de flâner quelques heures à Cascais, notamment le long de la rive d’où l’on peut admirer les amours du Tage et de l’océan. On passera à côté de la forteresse où Diogo de Meneses, gouverneur de l’Inde Portugaise, fut exécuté en 1580 par les castillans pour avoir résisté à leur invasion . Quelques centaines de mètres plus loin, la Boca do Inferno [bouche de l’enfer] est un site grandiose et d’une beauté angoissante. Nombreux furent les passionnés qui vinrent se suicider dans cette entaille profonde où les vagues s’engouffrent en mugissant, jetant par gros temps des gerbes d’écume qui jaillissent comme des geysers.
En soirée, revenir à Lisbonne par la ligne de train (jusque 1h30 du matin ) qui longe la Costa das Duas Primaveras [côte des deux printemps], ainsi désignée car les jardins y fleurissent deux fois l’an. On passera notamment devant Oeiras, où le marquis de Pombal fit bâtir une belle demeure, et devant Belém, son monastère et sa tour.